Riad Salamé: «La Banque centrale reste le dernier pilier solide du pays»

Riad Salamé: «La Banque centrale reste le dernier pilier solide du pays»
Riad Salamé, gouverneur de la Banque centrale libanaise depuis 1993. Hasan Shaaban/Bloomberg

ENTRETIEN – Le patron de l’institution libanaise, Riad Salamé,  se défend de tout enrichissement illicite.

Né en 1950 dans une famille maronite, Riad Salamé a été banquier chez Merrill Lynch pendant vingt ans avant que le premier ministre Rafic Hariri ne le nomme, en 1993, gouverneur de la Banque centrale. Depuis, les gouvernements libanais successifs l’ont tous reconduit dans ses fonctions.

LE FIGARO. – Le Liban connaît une grave crise financière. Le pays est en défaut de paiement depuis mars 2020. La valeur de la livre libanaise par rapport au dollar a été divisée par neuf. Les petits épargnants libanais sont ruinés. Comment en est-on arrivé là?

Riad SALAMÉ. – Le Liban a été frappé par deux déficits importants. Le premier causé par des budgets adoptés par le gouvernement et votés par le Parlement, qui ne prenaient pas en considération la nécessité de réformer, et qui ont procédé à des augmentations de salaires trop importantes dans le secteur public en novembre 2017. Le deuxième concerne la balance courante avec des importations excessives, au-delà des besoins du pays. Sur trois ans, entre 2017 et 2019, nos importations ont atteint 65 milliards de dollars.

Aujourd’hui le volume de nos importations a été divisé par deux. Cela s’explique notamment par le fait que le Liban a importé pour lui-même mais aussi pour la Syrie. À ces deux déficits, pointés du doigt par le FMI, et qui résultent avant tout de décisions politiques, se sont ajoutés des facteurs aggravants à partir de fin 2019: la fermeture des banques, l’explosion du port, le défaut de paiement du gouvernement en mars 2020 et la crise sanitaire mondiale.

La presse libanaise et plusieurs rapports internationaux vous accusent d’enrichissement illicite et de détournement de fonds: que leur répondez-vous?

C’est absolument faux. Je n’ai jamais eu d’argent illicite, ni opéré de détournement de fonds au préjudice de la Banque centrale, ni directement ni indirectement. J’ai expliqué le 8 avril 2020 sur une chaîne nationale les origines de ma fortune en montrant les documents, qui certifient que j’avais 23 millions de dollars de fortune en 1993, avant de prendre la tête de la Banque du Liban. J’avais accumulé cette fortune après vingt ans dans la finance, grâce à un salaire mensuel très important, de 165.000 dollars. Et j’ai su bien faire gérer cet argent par mes conseillers, et le faire prospérer.

Tout mon patrimoine est déclaré, y compris mes biens à l’étranger, et je paie mes impôts. Je n’ai jamais utilisé de prête-nom, comme beaucoup le font ; les sociétés propriétaires de mes biens sont légales et je suis toujours leur bénéficiaire économique affiché. C’est parce que tout est transparent qu’il est aussi facile pour mes détracteurs d’identifier mes biens et mon patrimoine dans le monde. Et de bâtir des histoires à partir d’analyses erronées. Toutes ces accusations relèvent d’un tapage visant à me nuire et font partie d’une campagne de diabolisation aux arrière-pensées politiques et idéologiques.

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