L’Islam de France se divise sur les valeurs républicaines.
Alors que le CFCM éclate sur sa Charte des « valeurs », le coup d’éclat de Chems Eddine Hafiz ouvre-t-il la voie à un schisme salutaire dans « l’Islam de France » ? L’édito de Michel Taube
Chems Eddine Hafiz, le Recteur de la Mosquée de Paris, homme fort du CFCM avec son Président Mohammed Moussaoui, l’a fait savoir hier par voie de communiqué : « J’ai décidé […] de ne plus participer aux réunions qui visent à mettre en œuvre le projet du Conseil national des imams et de geler tous les contacts avec l’ensemble de la composante islamiste du CFCM ».
La raison : les composantes islamistes du CFCM, le Conseil Français du Culte Musulman, refusent de signer un projet de charte des valeurs, comme le révèle Mohamed Sifaoui dans une tribune au JDD le 27 décembre.
Autant dire que le CFCM, voulu par Nicolas Sarkozy en 2007, est en train d’éclater et que l’Islam de France n’est pas près de sortir des conciliabules incessants et vains entre associations d’imams dans notre pays.
Il y a bien (au moins) deux Islam en France : les islamistes et les musulmans laïcs. Et le retrait de Chems Eddine Hafiz résonne comme un appel à tous les musulmans : l’heure de choisir son camp est venue.
Pour sa part, Chems Eddine Hafiz a décidé de faire primer la relation de l’Islam avec la République sur toute autre exigence du culte musulman : la soumission des cultes et des lois de Dieu aux valeurs de la République prime sur toute autre considération théologique. C’est une des meilleures définitions de la laïcité.
Quel est en effet l’objet du « délit » ? L’Etat peut-il s’ingérer dans la gouvernance de l’Islam en France et aller jusqu’à contrôler les cultes, notamment dans les enseignements que dispensent les religieux ? Dans son projet de Charte des valeurs, le Collectif des mosquées de France (CMF) regroupant une centaine de mosquées principalement en Ile-de-France proposait son interprétation de la laïcité française : « Les communautés religieuses ont le droit de vivre, de pratiquer et d’enseigner librement leur religion dans le cadre de la liberté de conscience dans un état de droit démocratique et laïc. Cette norme constitutionnelle, que nous défendons également, offre aux musulmans de France la possibilité de pratiquer librement leur religion. »