Renaissance d’un lieu mythique ! Mythique parce que, créé en 1869 par Ernest Cognacq et son épouse Marie-Louise Jaÿ, il fut le lieu incontournable des parisiennes en quête de nouveautés.
par Lydie Léa Chaize
Au départ Ernest Cognacq s’était installé dans une corbeille du Pont-Neuf, où aurait été découverte une pompe à eau, ornée d’une scène biblique montrant disait-on « La rencontre entre Jésus et La Samaritaine (femme de Samarie) devant le puits de Jacob, d’où le nom de Samaritaine ». J’aime à croire aussi que Le Bon Samaritain étant le personnage principal d’une parabole de l’Evangile, était proposé comme un modèle de la véritable charité, selon l’Histoire. De là à dire que les Cognacq-Jaÿ étaient de bons samaritains certes non, mais ils furent un duo professionnel hors normes dont Fernand Daudet, avocat au barreau de Nîmes écrivait en 1933 : « La Samaritaine : Le génie et la générosité de deux commerçants ».
Renaissance de ce lieu aussi, grâce à la puissance financière et à la volonté du PDG de LVMH, Bernard Arnault, grand visionnaire et fin stratège qui a su imposer son goût du luxe, inhérent à l’inventivité, à la qualité, au savoir-faire des humains. Confiant la conception et la gestion de La Samaritaine au groupe DSF (Duty Free Shoppers). Créé en 1960 par deux entrepreneurs américains, Robert Miller et Charles Feeney, ce groupe avait pour vocation « d’offrir aux voyageurs en escale des produits de luxe détaxés. Depuis, DSF emploie 5 000 salariés dans le monde, 885 points de vente dans les 4 continents, engendrant 176 millions de visiteurs par an !
C’est dire si le groupe LVMH, qui a investi en travaux 750 millions d’euros, est en droit d’espérer un retour sur investissement…. Bref ! Après ces considérations matérielles… passons en revue ce temple du luxe STUPEFIANT !
Désormais, La Samaritaine s’impose plus que jamais, par son architecture originelle ainsi que par ses créations architecturales et ses innovations multiples. Voulu par le couple Cognacq-Jaÿ, le bâtiment Art nouveau a été créé en 1910 par l’architecte Frantz Jourdain (pour la « petite » histoire, il a été également fondateur du Salon d’Automne en 1903, en réaction à l’académisme ambiant !…) et suivi d’une structure Art déco, conçue par Henri Sauvage en 1928. Environ, un siècle plus tard, tout a été respecté et restauré magnifiquement, sous la houlette de l’architecte en chef Jean-François Lagneau.
En entrant dans ce temple, on est saisi d’emblée par la lumière émanant de la grande et mythique verrière, restaurée à l’identique, dont le seul matériau moderne est le verre électrochrome qui se teinte en fonction de la luminosité. Son éclat souligne l’incomparable beauté de la fresque des paons de 425m2, conçue à l’époque par Francis Jourdain (fils de Franck Jourdain). La verrière a retrouvé tout son panache !
Quant au monumental double escalier d’origine, il s’impose par son élégance et par son garde-corps rutilant de 16 000 feuilles d’or.
Côté rue de Rivoli, le nouvel édifice présente une architecture ondulée et lumineuse, conçue par des architectes japonais. Une modernité qui invite le visiteur à découvrir les tendances de la mode urbaine, dans un « concept store » où se côtoient différents produits.
Face à La Seine et au Pont-Neuf (en réalité, c’est le plus vieux pont de Paris), La Samaritaine, plus que jamais mythique et majestueuse s’offre à nous dans sa splendeur passée et présente. En façade, notamment, toutes les plaques en laves émaillées ont été restaurées par la société Socra, spécialisée dans la restauration d’œuvres d’art, de monuments anciens et de vestiges archéologiques. C’est dire si tout a été fait avec une extrême minutie, forcément par des personnes à haute compétence.
L’aménagement intérieur très étudié présente des espaces différenciés. S’attarder sur des photos d’archives de La Samaritaine, c’est humer l’air d’autrefois…et prendre conscience de la valeur de ces artisans et de ces ouvriers qui ont participé au grand œuvre. Aujourd’hui encore, des femmes et des hommes ont accompli des prouesses de créativité, travaillant des matériaux nobles, pour que vive et se pérennise la Grande Histoire de La Samaritaine.
Vingt mille mètres carrés foisonnants, dans lesquels il est probable de trouver son bonheur : la boutique de Loulou (au rez-de-chaussée face au Pont-Neuf,) propose le cadeau original de dernière minute; la mode féminine et masculine, toujours inventive, est représentée par des marques françaises et quelques pièces exclusives de créateurs émergents donnent à l’envi. Sans oublier, la joaillerie, les chaussures, les accessoires, les cosmétiques et les grandes marques de parfum, dont des flacons-bijoux en verre de Murano (à voir absolument).
Au sous-sol l’espace beauté de 3 400 m2, conçu par Hubert de Malherbe est incontournable. Et pour marquer un temps de pose, il n’y a que l’embarras du choix sur les aires de restauration : sandwich au caviar, mini croque-madame, dîner au champagne,….Pour déguster un cocktail, rien de tel que de se rendre côté Pont-Neuf, au 5 ème étage, le grand mixologue Mattthias Giroud, propose une carte à nulle autre pareille.
C’est la tentation à tous les étages ! Mais, c’est aussi l’occasion de s’octroyer de longs moments de flânerie qui ne peuvent être qu’inoubliables !…Les amateurs d’art et de livres trouveront au rez-de-chaussée « une boutique » (future galerie d’art ?) où sont proposés, entre autres des objets signés et inédits, des éléments de décoration,….
Et, l’ultime luxe… si vous souhaitez dormir à Paris, dans le bâtiment Art déco avec vue imprenable sur La Seine, l’Hôtel « Cheval Blanc » vous attend pour répondre à toutes vos exigences !
Quoiqu’il en soit, gageons que non seulement les touristes mais aussi nos concitoyennes et concitoyens, amoureux ou non de Paris, auront à cœur de faire vivre ce lieu, témoin du présent et d’un passé pas si lointain, pour rendre hommage à tant de raffinement et pour que se perpétue cet esprit et ce fameux art de vivre à la française, devenu incomparable.
SAMARITAINE
9 rue de la Monnaie 75001 Paris – Tél : 01 88 88 60 00 / Samaritaine.com
Visite guidée de 1h15 par l’historienne Maud Hacker : sur réservation.
A LIRE EGALEMENT :
- « Samaritaines », sous la direction de Christian Caujolle.
- « Samaritaine », sous la direction de Jean-François Cabestan
- « LA SAMARITAINE ». Connaissance des arts, hors série n° 941.