Comprendre l’effacement et le déplacement du christianisme en France

Notre-Dame de Fourvière (Lyon). KONRAD K./SIPA

Le contexte électoral de cette rentrée renforce la question identitaire, qui prend une place prépondérante dans les esprits angoissés par les enjeux écologiques et migratoires notamment. L’effacement du christianisme dans la société, qu’il soit réel ou fantasmé, cristallise les inquiétudes de beaucoup dans l’Eglise et parfois au-delà. Si certains appellent à remobiliser les énergies dans un esprit de reconquête, d’autres s’interrogent sur la juste contribution des chrétiens à une société en pleine mutation. La récente parution du dernier livre de Guillaume Cuchet, « Le Catholicisme a-t-il encore de l’avenir en France ? » (Seuil) a suscité, de façon significative, nombre d’articles et interviews, interrogeant les scénarios possibles pour le christianisme en France [1].

Pour bien aborder le débat, il semble judicieux de préciser le rapport entre religion et société. En effet, pour qu’une religion se développe et profite pleinement à une société et à ses membres, il faut nécessairement la concomitance de trois aspects :

- une connaissance de sa doctrine et la bonne compréhension de son esprit,
- une appropriation libre, intime et en confiance dans l’âme du croyant,
- une visibilité sociale concrète en actes et l’engagement de son corps.

Seule l’articulation de ces trois dimensions permet un enracinement durable et un bénéfice réel pour le corps social. Le catholicisme s’est ainsi développé en France et en Europe, à partir de sa doctrine cohérente du monde créé et d’une heureuse destinée humaine, de la rémission des péchés de l’âme par la miséricorde divine. Il donnait aussi le témoignage de son espérance dans des œuvres charitables éducatives, sociales et médicales. Sans concurrence durant des siècles, il fut assuré d’un monopole sur les sociétés européennes. Il s’en est suivi logiquement une prétention à régenter les vies individuelles depuis les pensées intimes jusqu’à l’intime des relations, et à régenter aussi la vie temporelle, l’organisation sociale et le calendrier des fêtes.

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