Charte des principes de l’islam de France : tournant historique ou mirage dans le désert ?

Les avis sont partagés sur la portée de la Charte finalement signée par deux-tiers des fédérations qui composent le Conseil français du culte musulman (CFCM). L’association ultra rigoriste Foi et Pratique, une des neuf fédérations censées représenter l’islam de France

Charte des principes de l’islam de France : tournant historique ou mirage dans le désert ? L’édito de Michel TaubeCharte des principes de l’islam de France : tournant historique ou mirage dans le désert ? L’édito de Michel Taube

Emmanuel Macron serait-il naïf au point de penser que l’adoption d’une Charte va changer le cours des choses ?

Les avis sont partagés sur la portée de la Charte finalement signée par deux-tiers des fédérations qui composent le Conseil français du culte musulman (CFCM). L’association ultra rigoriste Foi et Pratique, une des neuf fédérations censées représenter l’islam de France, a refusé de signer la charte. Deux autres, dont le CCMTF sous influence turque, exigent d’amender le texte avant d’envisager de la signer. Faut-il saluer cette franchise ? Tous les récalcitrants demandent à consulter leurs bases car ils savent très bien que ces dernières sont encore plus rigoristes que leurs représentants.

Certains commentateurs voient dans cette charte une formidable avancée vers un islam de France parfaitement intégré à la République, comparable à celle obtenue par Napoléon à l’égard des Juifs en 1807, lorsque le Grand Sanhédrin accepta l’entière soumission aux lois laïques en échange d’une pleine citoyenneté des Juifs. L’analogie est hâtive et la comparaison peu pertinente, les juifs, au demeurant largement moins nombreux que les musulmans aujourd’hui, n’ayant jamais eu de dessein prosélyte.

Néanmoins, il est exact que la charte des principes de l’islam reconnaît une forme de soumission de l’islam à la loi laïque et à quelques-uns de ses principes, y compris l’égalité entre femmes et hommes, comme l’ont fait avant lui le christianisme et le judaïsme. Elle affirme également que la France n’est pas l’ennemi de l’islam, ce qui n’est pas sans importance après les vociférations haineuses de leaders politiques et religieux dans le monde arabo-musulman. On y remarque aussi la condamnation des salafistes et des frères musulmans. Sous cet angle, le problème de l’islam politique apparaît réglé. La page est tournée et on peut passer à autre chose. Bravo Macron, le Napoléon du XXième siècle !

Mais la mariée n’est-elle pas trop belle ?

D’autres analystes sont en effet bien plus circonspects : d’abord, l’engagement pris dans cette charte n’est en définitive que formel. On le sait bien : quand des dirigeants n’arrivent pas à (ou ne souhaitent pas) changer les mœurs, ils adoptent une Charte, excellent paravent pour l’opinion publique.

Ensuite, il manque du monde à l’appel. Les musulmans se réclamant des fédérations refusant de s’y associer vont-ils ouvertement prôner et pratiquer le séparatisme ?

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