
Que les militaires israéliens, de concert avec leurs conseillers américains, aient eu recours à l’IA contre les Palestiniens de Gaza, c’est normal et c’est devenu banal. Les enseignements retirés de l’expérience sont divers ; on en retient les « bavures », i.e. les dégâts collatéraux et, mais à un degré moindre, les pièges dans lesquels il ne faut pas tomber. Rien à dire, c’est redoutable, ça s’apprend et ce sont les risques du métier de part et d’autre. En revanche, c’est ailleurs que l’IA fait rage et qu’elle inquiète : car celle-ci est une arme potentielle de « destruction massive », comme une autre.
Musk se présente aux États-Unis tel Protée, sachant tout du passé et du présent et doté du pouvoir de prophétie et de la faculté de se métamorphoser : il nous propose tout à coup , avec Grock 3, l’IA soi-disant « la plus intelligente sur terre » ! Comme il tire son aura et qu’il détient son pouvoir de l’IA, des innovations et des ruptures correspondantes, il commence par faire table rase du passé en tentant de remplacer en bloc une nuée de fonctionnaires américains par l’IA – la sienne, bien entendu. Il fait à cette occasion la chasse au renseignement, qu’il s’agisse du FBI ou de la CIA, ou du Fisc et de la sécurité sociale, car il lui faut les données de leur clientèle pour s’en approprier aussitôt les clés, pour les référencer et les faire mouliner avec ses propres algorithmes, qu’il s’agisse des électeurs ou des contribuables, c’est-à-dire de tous les citoyens, et cela sans autorisation de personne ni la moindre protection de la vie privée des gens. Ce qui est ahurissant ! Après l’Amérique du Nord, pourquoi ne pas s’attaquer au reste de l’Humanité, avec la force de frappe des USA ? Sans limites aucunes. Le vice-président Vance reproche dès aujourd’hui à l’Union Européenne de brider ladite IA pour en contrôler les dérives éventuelles ! Il préfigure alors ce que sera le « monde d’après ». Mais nous sommes à la fois loin de l’ère du Sud Global et de son heure et de l’invention d’un nouvel ordre mondial, éventuellement favorable au groupe des BRICS, tel que le conçoit Bertrand Badie ; et nous sommes aussi tout près d’un effondrement civilisationnel de l’ancien monde, parce que l’IA va trop vite ! La course se fait sur une corde raide. Une nouvelle forme de colonisation par la conformité des messages et par l’uniformité induite de la pensée risque de balayer toute volonté de rupture avant que les colonisés n’aient eu le temps de s’en prémunir. Nombre de métiers disparaîtront, d’autres les compenseront, comme jadis et depuis l’invention de la roue, là n’est pas la question ! Les philosophes et les théologiens se penchent sur le problème. Les flux migratoires, par exemple, devront être régulés pour éviter la « submersion » des civilisations par le nombre, et puis les naissances et puis la démographie….mais ce n’est pas l’IA qui y pourvoira ! La « démocratie » fonctionnera par algorithmes intercalés. Cela donne le vertige : monsieur Vance semble vouloir le nier, en créant un tohu-bohu jamais atteint auparavant quand il morigène la vieille Europe à ce propos. Qu’il ait raison ou qu’il ait tort, à terme, ce sera le retour à l’ordre primordial, à la révision des échelles de valeurs et des rapports de forces. C’est dangereux.
Deuxième chuchotement d’Elon Musk, bruissant comme un méchant acouphène dans les oreilles présidentielles: l’armement et la monnaie (le sacro-saint Dollar), qui faisaient la puissance de l’Amérique, risquent d’être trappés d’obsolescence ! Le char de combat et l’avion de chasse « à coups de millions » n’auront plus besoin d’équipages ; ils seront impuissants devant les attaques de plus petits que soi « au prix d’une poignée de Dollars » ; seulement. Le drone est devenu intelligent ! Et même très intelligent (beaucoup plus malin que ne peut l’être un char, trop compliqué).
