Hantée par la perspective de l’après-pétrole, l’artiste koweïtienne Monira Al-Qadiri interroge le destin d’une région confrontée au déclin de cette ressource qui a fait sa richesse. Signe d’une évolution du débat dans la péninsule Arabique, l’une de ses sculptures est présentée à l’exposition universelle de Dubaï.
Au printemps 1991, le Koweït est un champ de fumée. L’armée en déroute de Saddam Hussein a mis le feu aux puits de pétrole, faisant surgir du ventre de la terre des flammes qui mettront des mois à s’éteindre. Cette scène d’apocalypse, Monira Al-Qadiri s’en souvient encore. Elle a 7 ans et ne comprend pas vraiment ce qui se joue devant elle. Elle passe la guerre enfermée à la maison, à dessiner dans le studio de sa mère, l’artiste Thouraya Al-Baqsami. On la tient à l’écart pour la protéger. Ainsi, quand son père, l’écrivain et diplomate Mohamed Al-Qadiri est emprisonné par l’armée irakienne, on lui raconte qu’il est parti en Europe.
UNE EXPÉRIENCE FONDATRICE
Dans cet univers limité, la fillette distingue tout de même une matière qu’elle n’avait jamais vue jusque-là. Le pétrole, tout à coup, n’est plus une abstraction. Pour la première fois de sa vie, elle le voit. Elle prend également conscience de l’existence de l’industrie pétrolière, dont les opérations se tiennent à l’écart du public, et comprend que le pétrole n’est pas « cette potion magique, métaphysique, que Dieu a envoyée pour rendre tout le monde riche »1 . « C’était un moment très étrange de voir le pétrole se révéler à nous comme une substance issue de la terre », se souvient l’artiste. LIRE LA SUITE