Karim Emile Bitar : « Les assassinats hantent la vie politique libanaise »

Karim Emile Bitar : « Les assassinats hantent la vie politique libanaise »
Le politiste Karim Emile Bitar, à Paris, en 2018. Eric Garault / Pascoandco

Entretien avec Karim Emile Bitar : Le Liban est une démocratie faible, analyse le politiste. Elle permet à une opposition d’émerger, mais laisse se développer des mouvements radicaux, déterminés à faire taire les voix qui ne leur conviennent pas. 

Le mondeL’élimination dans le sud du Liban, le 4 février, de l’intellectuel Lokman Slim, farouche opposant au Hezbollah, formation politico-militaire chiite aux liens étroits avec Damas et Téhéran, a fait resurgir dans ce pays le spectre des assassinats politiques. Karim Emile Bitar, directeur du département de sciences politiques de l’université Saint-Joseph de Beyrouth, retrace l’histoire de ce fléau, récurrent au Liban, et analyse ses ressorts et ses conséquences sur la vie politique locale.

Comment comprendre historiquement le recours aux assassinats politiques ?

Les assassinats politiques servent à éliminer des gêneurs, mais aussi à semer le chaos, pour infléchir le cours de l’histoire, en créant un choc, en faisant couler plus d’encre que de sang. Les penseurs anarchistes russes l’ont théorisé. Ils parlent de la « propagande par le fait », de la possibilité par ces actions d’accentuer les lignes de faille au sein d’une société, d’enclencher des cycles de violence et de répression qui forceraient la population à choisir son camp.

A quand remontent les assassinats politiques au Liban ?

L’un des premiers assassinats à avoir marqué le XXe siècle, au Liban, est celui du leader druze Fouad Joumblatt, en 1921, victime d’une rivalité entre familles du Chouf. C’est le père de Kamal Joumblatt, lui-même assassiné en 1977, et le grand-père de Walid Joumblatt, actuel chef de file de cette communauté. A son domicile de Beyrouth, ce dernier a accroché au mur un portrait de son grand-père, un autre de son père, a laissé une place vide pour le cas où il serait lui aussi éliminé.

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Propos recueillis par