Pour une poignée de dollars.

Pour une poignée de dollars, Donald Trump est prêt à vendre l’honneur de l’Amérique, l’Europe, Israël, l’Ukraine, le peuple iranien…

On sait que les États n’ont pas d’amis. Que des intérêts. Pas d’amis, certes, mais quels intérêts défend-on en ne se faisant que des ennemis ? À moins que ce soient d’autres intérêts qui animent le clan Trump, le clan des obsédés du dollar. Difficile en effet de croire que ce clan n’était pas informé et préparé aux multiples voltefaces douanières de son mentor. La bourse qui chute de 15 % en quelques jours et les regagne aussi sec. Des milliards perdus pour certains, mais des profits monstrueux pour ceux qui savaient, les initiés, comme on dit. Marjorie Taylor Greene, élue trumpiste à la Chambre des représentants, doit en savoir quelque chose. Plus qu’un délit d’initié, cet enchainement a des parfums de scandale d’État.

Pour une poignée de dollars, Donald Trump ne se privera pas de sacrifier l’Ukraine. Il voulait ses terres rares en échange d’un soutien politique et militaire. Mais Poutine lui en a promis de meilleures, plus grasses, plus juteuses. En Russie ? Mais non. À l’est de l’Ukraine pas encore totalement conquise. Mais c’est pour bientôt. Trump jubile, tout en déplorant les infâmes bombardements russes. Version officielle.

L’Iran, du moins les fanatiques obscurantistes qui la dirigent et la maltraitent depuis 1979, veut LA BOMBE. On ne peut que feindre de l’ignorer. Le Tigre de papier Donald Trump et son émissaire Steve Witkoff, le prétendu meilleur négociateur de la galaxie (la galaxie Trump, sans doute), s’apprêtent-ils à troquer l’aspiration à la liberté du peuple iranien contre une autre poignée de dollars ? L’Iran des ayatollahs, l’Iran du Hamas, des Houtis et du Hezbollah, a promis à Trump qu’elle n’en veut pas, de la bombe, mais qu’elle veut faire du business. Voilà un mot qu’il comprend et qu’il aime, le Trump ! Les tyrans de Téhéran ne lanceront pas tout de suite la bombe sur Israël. Chaque chose en son temps. Et même sans envisager cette hypothèse et la réaction israélienne qui ne pourrait être que cataclysmique, l’Iran deviendrait un monstre incontrôlable et susciterait une dangereuse course au nucléaire militaire dans un Moyen-Orient aussi instable que la nitroglycérine. Mais c’est un risque que le locataire (qui se croit propriétaire) de la Maison-Blanche semble prêt à prendre… pour une bonne poignée de dollars.

Certes, le pire n’est pas encore certain, et on peut encore espérer que tout cela n’est que du bluff pour faire bouger les lignes (dans quel sens ?). L’attitude de la Chine mérite une réaction, même si tout lui a été permis pour satisfaire le consommateur-électeur occidental. Mais quand la première puissance économique, financière et militaire du monde est fière de ne plus avoir ni alliés ni ennemis, mais seulement des cocontractants, quand la paix factice n’est qu’un moyen éphémère pour permettre à l’orgueilleux Trump de briguer un prix Nobel (il n’est pas prêt de l’avoir), quand les valeurs communes de l’Occident sont anéanties, on en arrive à regretter le gâteux Joe Biden.

L’élection de Donald Trump avait suscité autant d’espoir que d’inquiétude, surtout chez les Américains. Aujourd’hui, le vent a déjà commencé à tourner, et sans doute pas pour le meilleur, car l’après-Trump risque fort d’être réactionnaire, à sa manière : la revanche et même la vengeance du wokisme et le triomphe d’une extrême gauche souvent nauséabonde. La peste suivra-t-elle le choléra ? Et, contre l’un et l’autre, nous n’avons pas de vaccin.

Michel Taube