Libération : Vade retro, Conseil déontologique ! par Laurent Joffrin

La patte de velours d'Erdogan n'amadoue pas les Européens

Vade retro, Conseil déontologique !

LA LETTRE POLITIQUE Par Laurent Joffrin, Directeur de la publication de Libération 

La création d’un «Conseil de déontologie journalistique et de médiation», qui a tenu sa première séance lundi 2 décembre, suscite une polémique furibarde qui divise l’auguste profession, dont certaines éminences ont sonné le tocsin pour dénoncer une tentative de mise au pas de la presse.

Cette instance en gestation ne prononcera aucune sanction, ne comprendra aucun représentant du gouvernement et cherchera seulement à améliorer la pratique et l’image d’une profession décriée (taux de confiance : 24%) en recueillant les plaintes du public pour tenter de juger de leur pertinence, dans des avis indicatifs élaborés en commun. En dépit de toutes ces assurances, elle a suscité des réactions où, il faut bien le dire, le sophisme le dispute à la mauvaise foi.

Le projet, accusent ses contempteurs, est d’initiative gouvernementale. Outre que l’affirmation est inexacte – on en discute au sein de la profession depuis des lustres – cette remarque n’a guère de sens. Si le gouvernement dit qu’il fait jour à midi, faut-il proclamer aussitôt, pour démontrer son indépendance d’esprit, qu’on n’y voit goutte à cette heure-là ? Le projet doit être jugé en lui-même, bon ou mauvais, et non en fonction de son origine.

Menace-t-il la liberté de la presse ? Ce genre de conseil existe dans une centaine de pays, dont dix-huit en Europe. A suivre ces procureurs, la liberté de la presse serait honteusement comprimée en Suède, en Allemagne, en Belgique, au Canada et dans maints pays démocratiques. Supposition ridicule. LIRE LA SUITE