Élysée : Hollande-Poutine-Merkel

WP1-Orient le JourLes priorités occidentales : ne frapper que l’EI et garantir l’unité territoriale syrienne Rencontre Hollande-Poutine hier à l’Élysée et concertation à quatre, avec Merkel et Porochenko, sur l’Ukraine.

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Le président français François Hollande et la chancelière allemande Angela Merkel lors de leur déclaration conjointe à Paris. Photo AFP/Stéphane de Sakutin

Dans les formules de la politique moderne (4+2, 5+1, ou 2+3, etc.), une nouvelle équation a vu le jour hier sur les rives de la Seine : la 2×2. C’est-à-dire qu’au lieu d’une réunion à quatre selon le format dit « Normandie », qui aurait désigné les rencontres franco-russo-germano-ukrainiennes pour régler la question de ce dernier pays, on a eu droit hier à l’Élysée à deux réunions : un tête-à-tête François Hollande-Vladimir Poutine sur la Syrie et une concertation élargie sur l’Ukraine.


Il faut dire que depuis que l’ours russe a fait irruption sur le terrain de jeu syrien, le problème de l’Ukraine a perdu, il faut le reconnaître, de son acuité. Ce qui s’est traduit hier soir, à l’heure de la déclaration conjointe faite par le président français François Hollande et la chancelière allemande Angela Merkel, et après le départ du président russe Vladimir Poutine et de son homologue ukrainien Petro Porochenko, par une amplification médiatique « des résultats obtenus même tardivement en Ukraine », et un silence compréhensible sur la Syrie, dont il aura quand même fallu parler à l’heure des questions-réponses.

Aucun des deux prestataires de la déclaration conjointe n’a dramatisé les graves dissensions franco-russes sur la Syrie et plus particulièrement sur le rôle et le sort du président syrien Bachar el-Assad. Mais les deux dirigeants européens ont estimé que seule une solution politique pourrait mettre fin à la tragédie syrienne.
Au gré de la déclaration proprement dite et des questions-réponses, les frappes occidentales et russes ont été évoquées sous l’angle de la volonté franco-allemande de ne frapper que l’État islamique (EI), et de celle, russe, qui consiste à sévir contre tous les opposants en s’appuyant sur les forces de l’armée syrienne au service d’un régime que Moscou considère toujours légitime et surtout encore en place.

Le président Hollande a développé la thèse qu’il n’y a pas sur le terrain Daech (acronyme arabe de l’EI), d’une part, et le régime, d’autre part, mais qu’entre les deux il est des forces capables d’évoluer de manière à favoriser une bonne transition. La chancelière allemande a aussi démenti toute divergence de vues avec François Hollande sur l’attitude à avoir face au président syrien Bachar el-Assad, qui, disent-ils, doit quitter le pouvoir.

 

Intégrité et unité
Le président français a aussi dit avoir insisté auprès de son homologue russe sur la nécessité de maintenir l’intégrité et l’unité de la Syrie. « Qu’est-ce que ça voudrait dire d’avoir d’un côté une Syrie réduite à un certain nombre de territoires contrôlés par le régime et de l’autre un vaste ensemble laissé au chaos, et peut-être à l’organisation d’un califat ? Ce serait la pire des situations », a-t-il souligné. « Ce serait une partition que nous ne pouvons pas accepter (…) parce que ce serait, on le sent bien, une division fondée sur des critères religieux entre chiites et sunnites », faisant le jeu de l’EI, a-t-il insisté. M. Hollande a de ce fait souligné la nécessité de « travailler avec la Russie, les États-Unis, l’Iran, la Turquie, les États du Golfe et l’Union européenne » à la recherche d’un règlement politique du conflit, qui, a-t-il rappelé, a fait « 250 000 morts et quatre millions de réfugiés ».

L’impression générale était en fin de journée que les graves divergences franco-russes ne sont pas près d’être réduites, mais que les présidents Hollande et Poutine se refusent à maintenir strictement leurs positions. Des analystes sur place ont retransmis l’impression que la capacité de résister du chef de l’État russe est plus grande, du fait de la fermeté de sa ligne politique et du fait qu’il n’a pas de marge de manœuvre pour tempérer son attitude à propos d’un lâchage même à terme de Bachar el-Assad. En gros : il ne faut pas se focaliser sur l’antagonisme franco-russe, mais contourner le problème par un élargissement de la concertation internationale, c’est-à-dire en reprenant l’appel de François Hollande.