Edito du 3 août : LES EMPIRES FRAPPENT A NOUVEAU

Par Elias Masboungi

LES EMPIRES FRAPPENT A NOUVEAU

Au Levant et en Méditerranée, les empires ottoman et russe frappent à nouveau, après une longue partie d’échecs, sous l’œil critique d’un troisième (le Perse) qui excelle à ce jeu.

Ainsi, la Sainte Russie vole au secours de l’Orient chrétien et affronte la Turquie ottomane néo-musulmane avec, au premier rang, l’Iran chiite qui se contente pour l’instant de maintenir ses positions, exporter sa révolution et parer au danger israélien.

Ainsi, dans le nord-ouest du pays des Omeyyades, le président Erdogan fait reculer de facto la frontière turco-syrienne, remplaçant les populations kurdes de la zone par des Arabes relevant de ses supplétifs néo-islamiques et des réfugiés syriens triés sur le volet. Dans la région d’Afrine, la livre turque est en circulation, les programmes scolaires soumis à l’aval d’Ankara et l’électricité connectée au réseau turc.

Si Moscou semble laisser faire, c’est parce que selon lui l’heure de la grande négociation n’est pas encore venue et qu’il lui semble prématuré de disperser ses troupes solidement implantées dans le reste du pays.

 

Dans le sud-méditerranéen, en Libye une autre partie, non moins serrée se joue oppose les deux empires, le premier ayant conclu une solide alliance avec le «Gouvernement internationalement reconnu» de Fayez Sarraj délimitant les frontières maritimes et définissant la coopération pétrolière. Là, Vladimir Poutine compte sur l’Egypte soutenue par les Emirats Arabes Unis et d’autres pays de la Péninsule Arabique qui n’ont pas encore oublié les affres du joug ottoman.

Ce face-à-face perpétue en fait l’antagonisme du siècle dernier créé par le dépeçage de l’empire ottoman lors du traité de Sèvres en 1920 (suivi il est vrai trois ans plus tard de la conférence de Lausanne proclamant la république d’Ataturk). Avec de l’autre côté la Russie Soviétique qui n’a jamais apprécié l’adhésion de la Turquie à l’OTAN ni oublié la sanglante confrontation de la première guerre mondiale et ses suites.

Une possible détente serait prévue en cas de grand deal Washington-Téhéran dont le corollaire porterait sur de nouvelles délimitations avec Moscou. Un arrangement qui tiendrait compte des souhaits de la Turquie consacrée aujourd’hui comme puissance régionale aux côtés de l’Egypte.

Un deal conditionné il est vrai par le maintien de Donald Trump à la Maison Blanche.

En attendant, beaucoup de sang et de larmes couleront encore dans cet « orient compliqué ».