28 mars 2025 le Pdt Macron reçoit le Pdt Aoun


Monsieur le Président, messieurs les ministres, messieurs les ambassadeurs, mesdames,
messieurs.
Je veux, avant toute chose, remercier très chaleureusement le Président de la République
libanaise d’être venu aujourd’hui à Paris pour honorer les liens d’amitié indéfectibles entre nos
deux pays, alors que le Liban subit toujours les conséquences d’une situation régionale instable.
Et je veux ici dire toutes mes pensées, ma solidarité aux Libanais, aux Beyrouthins qui ont subi
de nouvelles frappes ce matin en violation du cessez-le-feu. Lorsque j’étais venu à Beyrouth,
dans la foulée de votre élection, Monsieur le Président, le 17 janvier dernier, pour vous marquer
notre soutien, vous m’aviez promis de réserver votre premier déplacement officiel en dehors de
la région à la France. Vous avez tenu cette promesse. C’est un symbole fort de votre confiance
dans la solidité du soutien français à votre pays pour traverser l’ensemble des épreuves qui se
présentent à lui et cheminer sur la voie tracée par vous-même et par votre gouvernement pour
rétablir le Liban dans sa pleine souveraineté et engager la reconstruction que les Libanais
attendent. La France est plus que jamais mobilisée à vos côtés, car nous croyons dans la
pertinence de votre action, de l’agenda souverainiste et réformateur que vous travaillez à mettre en œuvre depuis votre arrivée au pouvoir avec le Premier ministre et l’ensemble du
gouvernement. La France est aussi à vos côtés, par conscience de l’ampleur des défis à
surmonter qui nécessitent l’aide exigeante des partenaires du Liban. Cette aide, nous la portons
en priorité sur la restauration des institutions libanaises, car c’est la clé qui permet ensuite
d’engager la communauté internationale pour la reconstruction du pays et, au-delà, pour son
redressement économique, durable.
Mon envoyé personnel, Jean-Yves LE DRIAN, était au début de la semaine à Beyrouth, dans
le cadre d’une mission nouvelle sur la reconstruction du Liban et la relance de son économie.
Les échanges qu’il a eus à cette occasion permettront de mettre sur pied le plus rapidement
possible un cadre institutionnel qui réponde aux exigences internationales en matière de
financement, à même de convaincre les partenaires du Liban de s’engager. Ce travail se
prolongera par un déplacement à Riyad, puis à Doha dans les prochaines semaines, en étroite
coordination avec les autorités libanaises. Ce travail traduit l’approche en deux temps dont nous
sommes convenus. Dans un premier temps, en marge des assemblées de printemps, nous allons nous réunir avec les amis du Liban pour soutenir les réformes structurelles initiées en a montpar l’exécutif libanais et travailler à une première aide financière pour la reconstruction. À cetégard, les réformes bancaires et celles du Comité pour la reconstruction seront cruciales pour engager les partenaires.
Dans un second temps, en fonction des réformes institutionnelles et économiques lancées par
le gouvernement libanais, nous pourrons accueillir à Paris, au moment opportun, une nouvelle
conférence internationale sur le redressement du Liban. Cet événement aura vocation à préparer l’approbation d’un programme de financement de Fonds monétaire international. Dans cette perspective, nous allons évoquer avec le Président AOUN la poursuite du travail de coopération initié ces dernières semaines entre nos deux gouvernements. Il porte en priorité sur la refonte de la justice libanaise dont vous connaissez l’attachement de la France. Une délégation française de haut niveau se rendra prochainement à Beyrouth pour travailler à la mise en place rapide de
coopérations judiciaires et techniques au profit des magistrats libanais. L’autre priorité de
coopération, c’est l’énergie. Car le Liban a besoin d’un secteur énergétique performant qui le
rende moins vulnérable à l’instabilité régionale pour relancer durablement son économie, ses
industries et attirer les investissements. Aussi, la France est-elle disposée à mobiliser son
expertise, ses entreprises et l’ensemble des partenaires pour contribuer à de grands projets
stratégiques dans ce secteur.
Je le disais au début de mon propos, Monsieur le Président, nous croyons dans votre agenda de
souveraineté. Et je le dis avec d’autant plus de gravité que les frappes inacceptables sur
Beyrouth, encore ce matin, et que le regain de tension observé de part et d’autre de la ligne bleue marque aujourd’hui un tournant, et que cette tension est profondément inefficace et injuste. Et donc, la France continuera d’être à vos côtés pour préserver cette souveraineté et assurer pleinement, justement, votre sécurité. C’est ce que nous voulons faire à vos côtés dans le Sud.
C’est ce que nous voulons faire aussi à la frontière avec la Syrie, avec une situation, là aussi,
extrêmement délicate. Pour cela, la France continuera à se tenir résolument aux côtés du Liban
dans la continuité de son engagement, aux côtés des États-Unis et des Nations-Unies, pour la
mise en œuvre du cessez-le-feu conclu le 26 novembre dernier avec Israël. Des progrès réels
ont été réalisés ces derniers mois. L’armée libanaise a repris possession de la quasi-totalité du
Sud-Liban et progresse de façon volontaire dans le désarmement du Hezbollah. Votre
détermination à établir le monopole de l’État sur les armes a déjà produit des résultats. Dans ce
contexte, les frappes du jour, le non-respect du cessez-le-feu, sont des actions unilatérales qui
trahissent une promesse donnée et qui font le jeu du Hezbollah. La dynamique en cours doit se
poursuivre et chacune des parties devra respecter ses engagements pour ne pas compromettre
les progrès réalisés. L’armée israélienne doit se retirer au plus vite des cinq positions qu’elle
continue d’occuper en territoire libanais afin de permettre à l’armée libanaise de s’y déployer et
aux populations civiles de rentrer chez elle.
La France continuera d’œuvrer, elle, en ce sens, en étant force de proposition concrète et réaliste vis-à-vis des attentes libanaises et israéliennes. Je rappelle à cet égard que nous avons proposé que les contingents les plus robustes de la force intérimaire des Nations-Unies se déploient sur les points tenus par Israël, en coordination avec l’armée libanaise et sous la supervision du mécanisme de surveillance du cessez-le-feu où sont engagés des officiers américains et français.
Cette proposition est toujours sur la table. Aussi, nous ferons le point avec le Président AOUN sur l’ensemble des voies et moyens d’améliorer la situation, la proposition faite par les États-
Unis de favoriser des négociations directes, la libération aussi des prisonniers libanais tenus par Israël, qui demeure une priorité et qui doit faire partie, justement, des avancées. La France
soutient toujours les efforts de dialogue dans la région et tout effort visant à renforcer la stabilité
régionale. Nous serons donc prêts à nous engager dans la voie tracée par le partenaire américain dès lors, et j’insiste sur ce point, que les parties libanaises et israéliennes auront toutes deux fait part, de façon souveraine, de leur disposition à engager un dialogue autour de ces propositions.
Cette visite de travail nous a aussi permis d’évoquer la coopération avec la Syrie. Nous avons
en effet commencé notre entretien par un échange avec le Président de transition AL-CHAARA,
avec lequel nous avons eu une longue discussion, à la suite en particulier de la rencontre tenue
à Djeddah entre les ministres de la Défense syriens et libanais. Il s’agit à cet égard de travailler
à renforcer les souverainetés respectives du Liban et de la Syrie, la sécurité de leur frontière
commune et évoquer le lancement d’un processus qui, nous l’espérons, pourra mener à la
démarcation de cette partie de la frontière des deux pays. La France a proposé d’être facilitateur
de ce dialogue, d’apporter aussi ces moyens de surveillance, et l’échange que nous avons eu a été très fructueux.
La question des réfugiés syriens, de leur retour sûr et volontaire en Syrie a également été
évoquée avec les chefs d’État. Et là aussi, nous avons fait plusieurs propositions. Nous avons
ensuite été rejoints par le Premier ministre grec et le Président chypriote, et nous avons tenu
une longue discussion à cinq, qui a permis de définir des voies de coopération et d’action en
matière de sécurité, d’engagement de réforme sur la frontière, sur le retour des réfugiés, de
mobiliser aussi les financements et l’action internationale à cet égard. Et nous avons décidé
d’une feuille de route qui sera finalisée dans les prochaines heures et sur laquelle s’engageront
les cinq pays qui étaient ici rassemblés. Cette coopération régionale inédite est une avancée
majeure pour aider là aussi à renforcer la souveraineté du Liban et pour aider à consolider la
stabilité de la région. Monsieur le Président, en janvier, lors de ma visite, j’avais été frappé par
l’espoir immense que les Libanaises et les Libanais exprimaient.
Et aujourd’hui, à vos côtés, je crois que le Liban est sur la bonne voie. Monsieur le Président,
je me réjouis de continuer nos échanges pour dessiner ensemble ce Proche-Orient plus stable,
mieux intégré, respectueux des droits de tous les peuples, sans exception, auquel vous et le
Liban aspirez après de trop nombreuses années de violence et d’incurie. Nous serons à vos côtés pour assurer le succès de votre mandat en ce sens. Et fidèle à notre histoire, je serai heureux,
Monsieur le Président, de vous recevoir pour une visite d’État qui nous permettra de dire encore
l’amitié indéfectible qui lie le Liban et la France et permettre aussi de consolider les travaux que
nous avons lancés ces dernières semaines et consolider encore aujourd’hui.
Merci, Monsieur le Président, de votre présence, tout particulièrement aujourd’hui. Et sachez le
soutien et l’amitié de la France indéfectible.